Bonjour,
L’été arrive, occasion de partager avec vous des poésies françaises et un haïku japonais sur cette saison chaude.
Chaleur
Tout luit, tout bleuit, tout bruit,
Le jour est brûlant comme un fruit
Que le soleil fendille et cuit.
Chaque petite feuille est chaude
Et miroite dans l’air où rôde
Comme un parfum de reine-claude.
Du soleil comme de l’eau pleut
Sur tout le pays jaune et bleu
Qui grésille et oscille un peu.
Un infini plaisir de vivre
S’élance de la forêt ivre,
Des blés roses comme du cuivre.
Anna de Noailles – L’ombre des jours
Bourrasque d’été
Les nappes de papier blanc
Sur la table s’envolent.
Masaoka Shiki
Été
Être pour quelques jours
le contemporain des roses ;
respirer ce qui flotte autour
de leurs âmes écloses.
Faire de chacune qui se meurt
une confidente,
et survivre à cette sœur
en d'autres roses absente.
Rainer Maria Rilke
L’Été
Il brille, le sauvage Été,
La poitrine pleine de roses.
Il brûle tout, hommes et choses,
Dans sa placide cruauté.
Il met le désir effronté
Sur les jeunes lèvres décloses ;
Il brille, le sauvage Été,
La poitrine pleine de roses.
Roi superbe, il plane irrité
Dans des splendeurs d’apothéoses
Sur les horizons grandioses ;
Fauve dans la blanche clarté,
Il brille, le sauvage Été.
Théodore de Banville
Trois cerises rouges
Trois cerises rouges
Tout en haut d'un cerisier
Se balancent
Se balancent...
Je ne peux pas les attraper...
Trois groseilles rouges
Pendues à leur groseillier
Se balancent
Se balancent...
Le pinson les a gobées...
Trois petites fraises rouges
Bien cachées sous les fraisiers....
Pas de chance
Pas de chance !
L'escargot les a sucées !
Trois framboises rouges
Dressées sur leur framboisier
Je m'avance
Je m'élance...
C'est moi qui les ai mangées !
E. Ayanidès
Le jardin et la maison
Voici l’heure où le pré, les arbres et les fleurs
Dans l’air dolent et doux soupirent leurs odeurs.
Les baies du lierre obscur où l’ombre se recueille
Sentant venir le soir se couchent sur leurs feuilles,
Le jet d’eau du jardin, qui monte et redescend,
Fait dans le bassin clair son bruit rafraîchissant;
La paisible maison respire au jour qui baisse
Les petits orangers fleurissent dans leurs caisses.
Le feuillage qui boit les vapeurs de l’étang
Lassé des feux du jour s’apaise et se détend.
Peu à peu la maison entr’ouvre ses fenêtres
Où tout le soir vivant et parfumé pénètre,
Et comme elle, penché sur l’horizon, mon cœur
S’emplit d’ombre, de paix, de rêve et de fraîcheur…
Anna de Noailles - L'ombre des jours
Marie-Laure Tena - 20 juin 2018